понедельник, 21 сентября 2020 г.

Michael Lonsdale, le pèlerin comédien est mort

À l’instar d’un Laurent Terzieff ou d’un Jacques Dufilho, on se souviendra de Michael Lonsdale, décédé ce lundi 21 septembre à l’âge de 89 ans selon son agent à l’Agence France Presse, comme d’une sorte d’ascète habité par l’art et la foi. Chez lui, tout était douceur et mystère. La spiritualité était son quotidien. Inclassable, discret, sans fard. Ses silences autant que ses mots délivrés d’une voix posée et profonde en imposaient. Quel autre comédien aurait pu donner autant de force, d’intensité, de foi à l’admirable frère Luc dans le film de Xavier Beauvois Des hommes et des dieux, qui lui a valu un césar en 2011 ? Il faut à la fois beaucoup d’expérience et d’abnégation.

Deux qualités essentielles pour ce pèlerin comédien, capable de s’illustrer dans l’avant-garde comme dans le cinéma populaire, de s’inviter chez Marguerite Duras comme chez James Bond avec la même application, le même naturel. Sa carrière fut foisonnante, près de 140 films et autant de pièces de théâtre à l’image d’un artiste ouvert à toutes les expériences, sans trop se soucier de la critique.

Enfant illégitime, né à Paris d’une Française et d’un officier de l’armée britannique, le jeune Michael Edward Lonsdale-Crouch a passé son enfance entre l’Angleterre et le Maroc, avant de rejoindre Cannes en 1946. Deux ans plus tard, il s’installe à Paris, dans l’appartement de son grand-père maternel. Ce célibataire « par déception » ne le quittera jamais, vivant au milieu de ses souvenirs, de ses livres, de ses tableaux, de ses photos, de ses tubes de peinture et de ses chevalets.

Il n’a pas le bac, mais est curieux de tout

Peintre à ses heures, grand admirateur de Rembrandt, il suit la journée des cours de dessin dans l’ancien atelier d’artiste de Delacroix, rue de Furstemberg, va au théâtre le soir, trouve le temps de fréquenter la maison des moines, rue de la Glacière, et d’échanger avec des pères. Il n’a pas le bac, mais est curieux de tout, avide de culture. Nourri des films américains, de Jean Renoir et de Marcel Carné, il a une idée en tête : devenir comédien.

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Il devient alors l’élève d’une professeure exceptionnelle, Tania Balachova, croise en chemin Delphine Seyrig qui répète Roméo et Juliette, fréquente Jean-Louis Trintignant, Laurent Terzieff, Catherine Sellers. Deux ans d’apprentissage avant de faire ses débuts avec le metteur en scène Raymond Rouleau au théâtre Sarah-Bernhardt.

Acteur discret, voire secret, Michael Lonsdale avait touché le cœur des Français. © VALERY HACHE / AFP

La suite se déroule au fil de rencontres importantes, Samuel Beckett, Claude Régy, avec lequel il va jouer douze pièces, notamment La Chevauchée sur le lac de Constance (avec Delphine Seyrig, Jeanne Moreau et Gérard Depardieu). En 1968, il fait la connaissance de Marguerite Duras, pendant les répétitions de la pièce L’Amante anglaise, qu’il va jouer longtemps. C’est le début d’une amitié indéfectible, d’une belle complicité qui se poursuit au cinéma avec Détruire dit-elle, en 1969, et India Song, en 1975.

Auparavant, dans les années 50, Michael Lonsdale fait ses premiers pas devant la caméra sous la direction de Michel Boisrond (C’est arrivé à Aden, 1956), enchaîne avec Gérard Oury (La Main chaude, 1959), Yves Robert (Les Copains, 1965) et François Truffaut qui l’engage dans La mariée était en noir (1967) et Baisers volés (1968), dont une scène est tournée dans son appartement parisien.

Il tourne avec Spielberg, Welles, Losey et Carné

À partir de ce moment-là, ce travailleur infatigable n’arrêtera pas d’être à l’affiche de deux films par an, voire trois. Sa maîtrise de l’anglais lui permet de tourner dans les productions anglo-saxonnes : prêtre dans Le Procès d’Orson Welles (1962), informateur du Mossad dans Munich de Steven Spielberg (2005), méchant mégalo dans un James Bond, Moonraker (1979). Dans le rôle d’Hugo Drax, au côté du géant Richard Kiel, alias Jaws, il fait des merveilles. On le découvre même se faire fouetter les fesses chez Buñuel (Le Fantôme de la liberté, 1974) », lui qui semble si prude.

Impossible de lui coller une étiquette tant Michael Lonsdale s’amuse à brouiller lui-même les cartes, passant de la nouvelle vague à Hibernatus, avec Louis de Funès (1969), de Jean-Pierre Mocky (Chut !, 1971) à Joseph Losey (Monsieur Klein avec Alain Delon, 1976), de Georges Lautner (Il était une fois un flic, 1971) à Marcel Carné (Les Assassins de l’ordre, 1971), d’Alain Resnais (Stavisky, avec Jean-Paul Belmondo, 1974) à James Ivory Les Vestiges du jour, 1993. Même s’il a souvent le second rôle et n’a pas été épargné par quelques navets, selon son propre aveu, il excelle dans ce registre essentiel à un film et lui apporte toute son épaisseur, sa présence.

Là où on ne l’attend pas

Même éclectisme dans le théâtre où il a commencé dans le Boulevard, a poursuivi avec Rive gauche avec Laurent Terzieff et Jean-Marie Serreau, a tenté « l’avant garde » avec Dürrenmatt (Frank V), a joué les modernes, Beckett (Comédie), Nathalie Sarraute (Isma), Ionesco (Le Tableau), Edward Albee (La Mort de Bessie Smith), est revenu avec Rive droite avec Raymond Rouleau, puis s’est ressourcé tout récemment avec une série de lectures de Charles Péguy (Entre ciel et terre au Poche Montparnasse).

Michael Lonsdale est là où on ne l’attend pas. Libre, capable de tout jouer, les bons et les méchants, les inquisiteurs et les bourgeois, les tordus et les esthètes, les flics comme les prêtres, gravissant avec la même assurance tous les échelons de la hiérarchie ecclésiastique. On connaît sa foi profonde dont il a témoigné au fil de quelques livres, notamment Il n’est jamais trop tard pour le plus grand amour (2016). D’où, peut-être, la longue liste de rôles d’ecclésiastiques qu’il a incarnés à l’écran : prêtre d’une école dans Le Souffle au cœur de Louis Malle (1971), cardinal dans Galilée de Joseph Losey (1975), évêque dans Le Bon Roi Dagobert, un autre « navet » signé Dino Risi (1984), abbé déboussolé par la mort de ses frères dans Au nom de la rose de Jean – Jacques Annaud (1986), enfin, grand inquisiteur dans Les Fantômes de Goya de Milos Forman (2007).

Croyant, Michael Lonsdale n’avait pas de chapelle. Il laisse une belle œuvre et le souvenir d’un comédien humble, d’un homme bienveillant dont la quête spirituelle s’accordait à la vie quotidienne. Ce qui dans ce métier fait souvent de boursouflures est une rareté.

Source: lepoint.fr

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