суббота, 12 сентября 2020 г.

OM-PSG : l’heure de vérité pour la chaîne Téléfoot

Des bruits de perceuse, des odeurs de peinture fraîche par endroits… Il règne une atmosphère de start-up au siège de la nouvelle chaîne Téléfoot, un bâtiment industriel rénové de 4 000 m2, à Aubervilliers, où s’activent 150 salariés. Le nouveau canal de Mediapro, qui a déboursé quelque 800 millions d’euros pour les droits de Ligue 1 et Ligue 2 de 2020 à 2024, a été lancé in extremis, le 21 août dernier, pour la reprise des compétitions sportives.

Après des débuts compliqués par la crise sanitaire, des matchs reportés et des joueurs parfois contaminés au Covid-19, Téléfoot connaît son premier test pour recruter des abonnés avec le classico PSG-OM de ce dimanche soir. Le canal a pour objectif, à terme, de séduire 3,5 millions de personnes. « Avec le confinement, ce n’était pas simple, on ne pouvait pas sortir donc pas choisir des locaux. On n’a eu les clefs qu’en juin dernier », confie le directeur général Julien Bergeaud, dans son bureau où trône la une de L’Équipe au lendemain du sacre des Bleux au mondial 2018 : « Un bonheur éternel ». Crinière grise, sourire communicatif, voix qui monte souvent dans les aigus derrière son masque, ce Français passé par Discorey-Eurosport est chargé par Jaume Roures, PDG du consortium hispano-chinois Mediapro, de faire de Téléfoot, dont il a acheté les droits d’utilisation au groupe TF1, une chaîne rentable. Une mission impossible ? Entretien.

Le Point : Il paraît que vous supportez l’OM et que vous verriez d’un bon œil sa victoire contre le PSG ce dimanche soir…

Julien Bergeaud : Mais pas du tout ! Mes propos sur Europe 1 cette semaine ont été complètement sortis de leur contexte sur les réseaux sociaux. J’ai juste dit que l’OM n’avait pas gagné depuis 2011, que le PSG se présentait avec une équipe potentiellement moins forte et que si Marseille s’imposait ce dimanche, cela changerait peut-être le scénario des derniers championnats… Regardez ce qui s’est passé jeudi face à Lens : Paris, avec une équipe composée surtout de jeunes, a perdu.

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PSG-OM n’est-il pas le match décisif de Téléfoot, ou, comme on dit dans le jargon footballistique, une rencontre à 6 points ?

C’est une grande étape, un « milestone » important. Ce dimanche va représenter un marqueur pour la suite. C’est pourquoi c’était très important de boucler un accord de distribution avec Orange et ses 12 millions de clients avant la confrontation. L’opérateur télécoms a mis en place la chaîne 48 sur la box jeudi dernier. Pour nous, c’est essentiel que la chaîne soit distribuée par les quatre opérateurs télécoms français : Orange, Free, SFR et Bouygues Telecom.

Quel est le dispositif prévu pour ce match ?

Nous avons déployé de grands moyens, avec une caméra suspendue sur les filins pour la vue aérienne, des caméras 180 degrés derrière les poteaux et une réalisation en ultra haute définition 4K. Nos journalistes suivront sur les bords du terrain tant l’OM que le PSG, et Hatem Ben Arfa, qui a joué dans les deux clubs, sera en plateau.

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Les années précédentes, les classico sur Canal+ ont attiré environ deux millions de téléspectateurs. Quelle audience attendez-vous ?

Téléfoot ne va pas faire deux millions de téléspectateurs. Car Téléfoot se lance tout juste et je n’ai pas autant de foyers initialisés. Pour l’heure, nous sommes encore en phase de lancement.

Quels ont été vos pics d’audience jusqu’à présent ?

Je ne peux pas vous le dire. Téléfoot commence à peine à être mesurée par Mediamétrie. Nos chiffres d’audience ne seront pertinents que lorsque la chaîne aura atteint son rythme de croisière. Après le classico, du fait du Covid-19 et des reprogrammations de matchs, nous avons une semaine de fous avec un match à 21 heures du mardi 15 au dimanche 20 septembre, avec Lyon, le PSG, l’OM, Rennes, Monaco… Je crois que cela n’est jamais arrivé en Ligue 1. C’est assez exceptionnel !

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Comment la crise sanitaire a-t-elle impacté les premiers pas de Mediapro en France ?

Elle nous a fait prendre du retard. Ce fut assez dingue. On s’est confiné en mars alors qu’il y avait tout à faire : trouver des locaux, passer des accords de distribution, recruter les gens, mettre en place les moyens de production… Il a fallu tout faire en visioconférence. Finalement, nous n’avons eu les clefs de nos locaux qu’en juin et on a réussi à lancer la chaîne le 21 août. Les équipes ont fait un super boulot dont je suis fier.

De quelle manière le Covid-19 affecte-t-il votre démarrage commercial ?

Mediapro a acheté des droits sans savoir quand ni dans quelles conditions allait redémarrer le championnat. Quand vous devez vendre à des distributeurs un produit sans savoir quand cela va commencer, c’est compliqué. Il y a aussi eu l’impact sur les calendriers et les joueurs. La première journée de Ligue 1, il y avait encore des matchs de Ligue des champions et de l’Europa League sur d’autres chaînes. On devait diffuser Marseille-Saint Étienne comme premier match, mais non : des joueurs de l’OM ont été contaminés par le Covid-19 et le match a été reporté. Même ce dimanche soir, certains joueurs du PSG ne seront pas présents (plusieurs, dont Neymar, Mbappé et Di Maria, ont été testés positifs après des vacances à Ibiza, NDLR). On est déçus, mais il faut s’y faire : il va falloir composer avec le virus toute la saison. Du moins, jusqu’à ce qu’il y ait un vaccin…

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Avec des stades limités à 5 000 personnes, rajoutez-vous du son pour le téléspectateur ?

Oui, nous lançons des sons d’ambiance comme s’il y avait un public complet. Le résultat est assez bluffant, on s’y habitue. Pour la réalisation, on évite les plans larges sur les tribunes vides.

Comment allez-vous éviter à l’avenir les bugs techniques que vous avez connus lors de la deuxième journée ?

Nous avons été victimes d’une panne Internet mondiale, comme la plateforme Hulu ou la diffusion de la Formule 1, via notre prestataire aux États-Unis qui a connu un « breakdown ». Internet, c’est comme les aéroports, s’il y a un retard à un endroit, il se répercute. Nous avons réparé le problème rapidement et réussi à diffuser le match de l’OM le dimanche soir sans encombre. Aujourd’hui, nous avons changé de prestataire, nous en avons cinq différents dans cinq régions du monde, comme cela nous sommes couverts ! Nous avons proposé à nos abonnés une réduction de 25 % sur un mois, soit en à-valoir, soit à rembourser. Le problème n’était pas de notre fait et ce geste commercial a été bien reçu.

Au niveau de la distribution de la chaîne, pourquoi n’avez-vous pas encore signé avec Canal+ ?

Car pour signer un accord, il faut être deux ! Nous avons ouvert des discussions avec Maxime Saada et ses équipes qui n’ont, hélas, pas encore abouti. Bien sûr, c’est problématique pour les fans de foot. Mais entre l’accord avec TF1 (sur la marque Téléfoot), Netflix, SFR, Bouygues, Free, Orange… nous avons démontré notre capacité à trouver des accords. Il y a 15 millions d’aficionados du ballon rond en France et, pour les toucher, il y a les distributeurs classiques, mais aussi les nouveaux entrants et les Gafa. Ainsi, nous parlons actuellement avec Facebook et YouTube et avec d’autres acteurs du monde des télévisions connectées et des consoles. Notre stratégie est d’avoir la chaîne la plus largement distribuée.

Beaucoup de fous de foot, justement, se plaignent de la multiplication des offres et de l’inflation des prix des abonnements…

Téléfoot a construit une offre avec des gammes de prix et des contenus différents. Pour 25,90 euros par mois, le meilleur du foot. L’année dernière, pour avoir accès à ce que nous proposons, soit 85 % des matchs de Ligue 1 et 8 matchs de Ligue 2 par journée, plus toute la Champions League et l’Europa League cette saison, il fallait s’abonner à 3 chaînes et débourser 65 euros au total, 45 euros avec promotion. Aujourd’hui, vous avez tout cela sur une seule chaîne pour beaucoup moins cher. En outre, nous avons rajouté la brique Netflix à 29,90 euros par mois pour ceux qui veulent du foot avec du divertissement, des films et des séries. Il y a aussi une offre d’entrée de gamme à 14,90 pour les tablettes et les smartphones pour ceux qui ne veulent pas dépenser plus. Nous proposons donc une réponse à ceux qui pensent : « J’en ai marre d’avoir plusieurs abonnements partout, je ne sais plus à quoi être abonné »… Qu’ils s’abonnent à Téléfoot !

Un fan qui veut voir les matchs de Ligue 1 du samedi va quand même devoir coupler son abonnement avec Canal+…

Pas nécessairement, car Téléfoot codiffuse le samedi au moins 19 matchs par saison.

Certains disent que la France manque de culture footballistique. Quelle est votre opinion ?

Je n’aime pas le « football bashing ». Les Français sont très fiers et orgueilleux et ont tendance à se plaindre et à dire que c’est mieux ailleurs. Notre pays est une terre de football depuis toujours et la culture du ballon rond y est aussi forte qu’en Espagne ou en Angleterre. Même si elle a toujours souffert de la comparaison avec les autres grands championnats européens, la Ligue 1 a toujours été de très haut niveau. Elle produit des pépites avec des joueurs de très grande qualité qui se révèlent après à l’étranger. Regardez, la semaine dernière, Camavinga de Rennes a été sélectionné chez les Bleus. On a quand même gagné la Coupe du monde 2018 et 1998 et plusieurs Euro.

Le journaliste de RMC Daniel Riolo dit qu’on manque d’intellectuels pour penser le foot. A-t-il raison ?

(Fou rire). Je ne veux pas jouer les journalistes, ce n’est pas mon rôle. Je ne veux pas créer de polémique.

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Avec la crise, le marché des transferts de joueurs risque d’être atone. Cela ne va-t-il pas pénaliser l’attractivité du championnat ?

La crise a fait perdre grosso modo 500 millions d’euros aux clubs. J’ai un peu peur qu’ils doivent vendre plein de joueurs pour équilibrer leurs comptes. La valeur des clubs dépend beaucoup de ses joueurs et cela serait vraiment dommage de voir la Ligue 1 se vider de ses talents et de ses pépites alors qu’il est sur le point d’arriver au même niveau que ses homologues anglais et espagnols. Je suis donc particulièrement attentif. J’espère que le 5 octobre, dernier jour du mercato, on pourra dire que le championnat ne s’est pas trop vidé. Je croise les doigts.

Avec la crise, avez-vous changé vos objectifs d’abonnement ?

Non, nous visons toujours les 3,5 millions d’abonnés. C’est notre business plan pour être rentable à la fin de cycle des droits, en 2024. On sait qu’on va perdre de l’argent au début, puis on se rapprochera de l’équilibre et on en gagnera après. En Espagne, nous avons réussi à avoir 4,5 millions d’abonnés avec 10 matchs de Liga par semaine, et nous n’avions pas toute la Champions League et la Ligue Europa comme en France. On a encore besoin de se faire connaître. C’est pour cela que nous avons choisi le nom Téléfoot : cette marque parle à tout le monde.

Même si dans le passé le groupe beIN Sports n’a jamais réussi à atteindre l’équilibre financier ?

On compare beaucoup Téléfoot à beIN. Mais ils n’avaient pas comme nous 85 % des matchs de Ligue 1 et 80 % des matchs de Ligue 2, toute la Champions League et toute l’Europa League. La comparaison a donc ses limites. Mediapro n’est pas en France avec Téléfoot pour perdre de l’argent. Le groupe s’est construit progressivement et emploie 7 000 personnes dans le monde. Vous savez, il y a eu beaucoup de Mediapro sceptiques. Des personnes qui pensaient qu’on était en France pour faire de la revente de droits et de négoce, car c’est l’une des activités de la société. Mais Mediapro a aussi créé près de 15 chaînes dans le monde. Cela a fonctionné en Espagne et il y a une chaîne comme Téléfoot qui vient d’être lancée en Belgique il y a deux semaines et l’année dernière aussi au Canada.

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Vous avez dévoilé une équipe de consultants que vous appelez « dream team », pourtant sans vraies stars…

Les gens aujourd’hui veulent des experts qui leur racontent leurs spectacles. C’est pour cela que nous avons recruté des joueurs récents qui étaient pour certains sur le terrain il y a un an. Ils connaissent les joueurs dont ils parlent, ont joué avec eux et bénéficient d’accès privilégiés sur le terrain. La philosophie de Téléfoot est d’avoir un traitement bienveillant du football sans être béni-oui-oui pour autant. Si quelque chose ne va pas, on le dira. Téléfoot n’a pas choisi de parti pris polémique, comme cela se fait à la télévision ou sur les réseaux sociaux. Cette posture est « has been ». Surtout après l’année qu’on a vécue, où le foot a beaucoup manqué au public.

Seriez-vous intéressé par racheter d’autres droits sportifs à l’avenir ?

Oui, les compétitions féminines par exemple. Mais les droits de la Ligue 1 féminine ne sont pas disponibles avant 2023.

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Source: lepoint.fr

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