воскресенье, 8 марта 2020 г.

Séverine Servat de Rugy : « Les gens ont-ils besoin d’une vérité ? »

« Une cabale, ni plus ni moins. » Huit mois après l’été tumultueux qui a abouti à la démission de son mari, ministre de la Transition écologique à l’époque, Séverine Servat de Rugy revient pour la première fois sur une affaire dont elle dénonce l’injustice. Dans un livre, La Marche du crabe (Michel Lafon), elle raconte sa vérité. « Mais les gens ont-ils vraiment besoin d’une vérité ? », s’interroge-t-elle ce 8 mars dans un entretien accordé au Journal du dimanche.

« Dans cette affaire, j’ai eu l’impression d’être instrumentalisée de façon sexiste, comme si j’étais une faille, dénonce la journaliste. Quand on veut déboulonner un homme politique, il est facile de s’attaquer à sa compagne : elle est plus vulnérable. » Si elle se défend de tout règlement de compte et tient à rappeler qu’un gouvernement « ce n’est pas une armée de profiteurs, mais des gens qui travaillent au-delà de la raison », un membre du gouvernement de l’époque, un seul, est clairement pointé du doigt dans l’ouvrage. Son nom, Benjamin Griveaux.

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« De la meute, Griveaux est passé du côté du gibier »

À l’époque, le porte-parole du gouvernement avait un tantinet accablé son ministre de l’Écologie après la diffusion des photos d’un dîner où était servi du homard. Benjamin Griveaux déplorait alors « l’image terrible » donnée de la fonction de ministre par François de Rugy tandis que lui cuisinait lui-même au ministère et « pas du homard, de la côte de bœuf ».

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« La solidarité n’existe pas en politique, rétorque Séverine Servat de Rugy, et je vous fais remarquer que la côte de bœuf coûte plus cher que le homard ! Le livre était déjà sous presse quand les ennuis [de Benjamin Griveaux, NDLR] sont arrivés. C’est terrible et je le déplore. De la meute, il est passé du côté du gibier. Comme beaucoup, j’ai d’abord pensé qu’il s’était montré imprudent. Mais la morale doit-elle être le déterminant de l’efficacité pour résoudre les problèmes du chômage, des discriminations et tout le reste ? Si quelqu’un a les clés, même s’il est borderline en privé, je dirai que c’est son affaire. Benjamin Griveaux n’a probablement pas pensé à moi quand François a démissionné ; mais moi, le jour qui a suivi son retrait, j’ai pensé à lui et à son épouse. »

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Une photo mise en scène pour un futur chantage

Mais en publiant ce livre, la journaliste saisit surtout l’occasion de raconter comment, selon elle, ces photos se sont retrouvées dans la presse, une enquête remise clé en main à des journalistes d’investigation. Pour elle, il s’agit d’une vengeance personnelle, « une cabale, ni plus ni moins ». « Une de mes amies, raconte-t-elle, me demandait avec insistance de lui présenter de grands patrons. Elle m’a aussi demandé d’intercéder auprès de mon mari pour un redressement fiscal, je crois me souvenir qu’il était question d’un million d’euros. Comme j’ai refusé, elle m’a envoyé un texto menaçant : « Ton mari ne sera pas toujours ministre. »

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L’amie en question aurait mis sa menace à exécution en insistant pour prendre des photos du couple posant fièrement aux côtés de grands crus, notamment. « Quelque temps auparavant, quand mon mari présidait l’Assemblée, je l’avais invitée pour Noël à l’hôtel de Lassay parce qu’elle se disait en détresse. À un moment, elle s’est collée derrière moi et m’a fait poser devant une bouteille de vin en me disant : C’est le vin préféré de ma mère. Ça m’avait paru bizarre, mais bon. Quand j’ai vu la photo publiée par Mediapart, je n’ai pas eu de mal à me rappeler la scène… ni la date : ce réveillon, c’est la seule fois – en quatorze mois – qu’on a eu du homard sur la table. »

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D’autant que, pour les lobbys, le ministre de l’Écologie est bien souvent l’homme à abattre. Le prédécesseur de François de Rugy en avait fait les frais. L’occasion était trop belle, selon son épouse : « Ministre de la Transition écologique, il était à l’intersection d’une multitude d’intérêts économiques. Outre les inimitiés et les rivalités, il était à la merci d’officines. Je n’ai pas de preuve, mais comment expliquer une telle avalanche d’accusations fausses surgies au même moment dans le seul but de discréditer un ministre : le logement social de la directrice de cabinet, ses frais de mandat quand il était député, les repas à l’hôtel de Lassay ? Tout le monde sait comment ça s’est terminé. Mon mari a remboursé quelques dépenses qui pouvaient sembler plus personnelles que professionnelles, aucune poursuite n’a été engagée – ni judiciaire, ni fiscale, ni déontologique. Un dossier composé de fake news a été livré tout ficelé à nos accusateurs. »

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