среда, 29 июля 2020 г.

Quand l’Iran s’attaque à un faux porte-avions américain

C’est une mission à haut risque que réalise le porte-avions américain USS Nimitz dans le détroit d’Ormuz. En pénétrant dans cet étroit bras de mer situé entre le sultanat d’Oman et l’Iran, par lequel transite le quart des exportations mondiales de pétrole, le bâtiment américain, qui transporte une quinzaine d’avions de chasse F-18, se sait épié par les gardiens de la Révolution iraniens. Au mois d’avril, onze vedettes rapides appartenant à l’armée idéologique de la République islamique avaient croisé de très près des navires américains patrouillant dans la zone. Depuis, Donald Trump a ordonné à l’US Navy de détruire toute embarcation qui harcèlerait les forces américaines dans la région.

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Pourtant, ce mercredi 29 juillet, la mission du porte-avions ne se passe pas comme prévu. Il est pris pour cible par un hélicoptère appartenant aux Pasdarans [gardiens en persan, NDLR], qui tire un missile dans sa direction. Des vedettes rapides iraniennes sont ensuite déployées autour du navire américain qu’elles encerclent, et un commando des gardiens de la Révolution est hélitreuillé sur le pont du bâtiment pour en prendre le contrôle. Gravissime, l’incident est en réalité un exercice militaire mené par la République islamique dans les eaux du golfe Persique. Et le porte-avions américain n’est qu’une maquette grandeur nature construite par l’Iran, tout comme les chasseurs qu’il est censé transporter.

À en croire la télévision d’État iranienne, l’embarcation factice a été détruite par des missiles sol mer tirés depuis le territoire iranien. Mais sur les images diffusées par la République islamique, on aperçoit que des dégâts mineurs sur la coque en taule de fer de la maquette. « Il s’agit simplement d’une barge servant de cible qui a été remorquée sur zone par les Iraniens », explique au Point Amir*, analyste spécialisé dans les questions militaires iraniennes et auteur du blog IranGeoMil. « Cette maquette avait déjà été utilisée par l’Iran en 2015 lors d’un précédent exercice majeur, avant d’être conservée dans un port afin d’y être réparée en vue de cette nouvelle manœuvre. » Si la marine américaine a dénoncé le comportement « irresponsable et dangereux » de l’Iran, elle a toutefois précisé que ces opérations n’avaient pas perturbé son activité dans la région ni entravé la libre circulation du commerce dans le détroit d’Ormuz.

Nouveaux missiles balistiques

Baptisée « Prophète Mohammad 14 », la démonstration militaire des gardiens de la Révolution a été raillée sur les réseaux sociaux, notamment en raison de la piètre qualité de la reproduction iranienne du porte-avions américain. Mais en concentrant l’attention médiatique, la maquette a quelque peu éclipsé le nouvel arsenal militaire dévoilé à l’occasion par les Pasdarans. « Des équipements et armes inconnus ont été utilisés, tels que des missiles balistiques à longue portée capables de frapper à distance des cibles flottantes offensives », a déclaré mardi le général Abbas Nilforoushan, cité par le site Internet des gardiens Sepahnews.

Ce mercredi, une vidéo publiée par le site iranien spécialisé Ima Media a levé une partie du voile autour de ces nouveaux équipements : il s’agirait de missiles balistiques présentés comme souterrains. « De un à trois nouveaux missiles balistiques ont été testés lors de cet exercice militaire », estime l’expert iranien Amir. « L’un d’eux ressemblerait au missile Zolfaqar, de 700 kilomètres de portée, tandis que l’autre se rapprocherait du Dezful, qui atteint pour sa part 1 000 kilomètres de portée. En revanche, le troisième serait totalement inédit. Les Iraniens ont également utilisé pour la première fois les roquettes d’artilleries guidées Fajr-4 contre un navire, ainsi que la bombe guidée Yasin », ajoute le spécialiste.

De son côté, la télévision publique iranienne a diffusé ce mercredi les images du lancement réussi de quatre missiles balistiques décrits comme souterrains. Dans un communiqué publié sur Sepahnews, les gardiens de la Révolution ont salué « le lancement réussi de missiles balistiques depuis les profondeurs de la terre de manière totalement camouflée ». À en croire les Pasdarans, il s’agirait d’une « réalisation importante qui pourrait poser de sérieux défis aux organisations de renseignement ennemies ». Les tirs de missiles balistiques iraniens ont provoqué l’interruption pendant quelques minutes de l’activité dans les bases américaines d’Al-Dhafra, à Abou Dhabi et d’Al-Udeid, au Qatar, selon le commandement central américain.

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Décrié par les pays occidentaux qui appellent à son démantèlement, le programme balistique de la République islamique est officiellement de nature « défensive », répètent à l’envi les dirigeants iraniens qui rappellent que l’Iran est toujours frappé par un embargo sur les achats d’armes conventionnelles, arrivant à expiration cet automne. « Nos politiques visant à protéger les intérêts vitaux de notre chère nation sont défensives, dans le sens où nous n’envahirons pas de pays dès le début, mais nous sommes totalement offensifs dans nos tactiques et nos opérations », a toutefois indiqué mardi le général Hossein Salami, le chef des gardiens de la Révolution.

Conflit ouvert

Les tensions entre les États-Unis et l’Iran sont à leur paroxysme depuis l’élimination de Qassem Soleimani, le chef de la branche extérieure des gardiens de la Révolution, par une frappe de drone américain le 3 janvier dernier à Bagdad. Depuis, les accrochages se multiplient entre les deux pays ennemis et les rapprochent chaque jour davantage d’un conflit ouvert. Dernier incident en date, « l’approche » réalisée le 23 juillet dernier par deux chasseurs américains contre un avion de ligne de la compagnie iranienne Mahan Air qui volait au-dessus de la Syrie, faisant plusieurs blessés parmi les passagers.

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Dans ce contexte explosif, difficile de ne pas voir dans l’exercice militaire iranien un message directement adressé à Washington, alors qu’un porte-avions se trouve en ce moment même dans la région. « Le message est évident », confie un journaliste iranien spécialisé dans les questions de défense. « Quand la maquette d’un navire américain est prise pour cible, cela signifie que le vrai porte-avions peut également être visé. »

* Amir est un pseudonyme.

Source: lepoint.fr

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