Dans un discours d’une heure, le Premier ministre a présenté aux députés les grandes lignes des «600 jours» durant lesquels il va, notamment, déployer un plan de relance de 100 milliards d’euros pour faire face à la crise économique déclenchée par la pandémie de coronavirus.
Après avoir laissé au président de la République la primeur d’une prise de parole traçant le «nouveau chemin» voulu par Emmanuel Macron, le Premier ministre Jean Castex a prononcé mercredi à l’Assemblée nationale une déclaration de politique générale d’une heure, qu’il a voulu comme la feuille de route des «600 jours» à venir. Le nouveau chef du gouvernement, qui n’avait jamais détenu de mandat national, s’adressait aux députés 12 jours après sa nomination à Matignon. Voici les principaux éléments de son discours.
Un discours de crise. Dès les premières secondes de son intervention, le Premier ministre a pris soin de souligner qu’il s’exprimait à un «moment particulier de notre histoire». Il a répété à plusieurs reprises que la «crise sanitaire n’est pas terminée». «La meilleure façon de nous préparer à une reprise possible de l'épidémie est de renforcer nos actions de prévention», a-t-il estimé. Il a ainsi promis le «développement du port du masque» et l’«intensification de la politique de dépistage» avec pour objectif d’«éviter par dessus tout le retour à des formes strictes et larges de confinement». Sur le plan économique, Jean Castex a jugé que la crise est «d'une ampleur probablement inégalée depuis la dernière guerre mondiale».
Un hommage appuyé à son prédécesseur. Jean Castex a pris soin de vanter un bilan qui n’est pas le sien. Citant à plusieurs reprises Edouard Philippe, il a salué l’action du gouvernement contre le coronavirus. «L'histoire retiendra aussi le courage et le sang froid avec lesquels Edouard Philippe a affronté la crise, j'en ai été personnellement le témoin direct», a-t-il déclaré. Il a dépeint une France dans une situation particulièrement favorable, selon lui, avant la survenue de la pandémie. «La France était devenue le pays le plus attractif d'Europe», a-t-il avancé.
La priorité : l’emploi. La lutte contre le chômage sera «l’obsession» du gouvernement Castex, a promis le Premier ministre. Les jeunes feront l’objet de mesures spécifiques, avec dès vendredi la discussion d’un plan jeunesse avec les partenaires sociaux. Afin de favoriser l’emploi des jeunes, des exonérations de charges seront accessibles pendant au moins un an à toutes les entreprises qui embaucheront un jeune de moins de 25 ans à hauteur de 4000 euros par an jusqu’à 1,6 smic. Jean Castex a également confirmé le retour d’une forme d’emplois jeunes, avec «300 000 parcours et contrats d'insertion». Les dispositifs d’activité partielle, qui ont accompagné les entreprises depuis le début du confinement, vont se poursuivre et coûteront selon Jean Castex 30 milliards d’euros en 2020 et encore 8 milliards en 2021. L’accent sera mis sur la formation, avec 200 000 places supplémentaires dès 2021. Dès vendredi, l’aménagement de la très contestée réforme de l’assurance chômage sera discuté entre les partenaires sociaux.
Le mot-clé : «territoires». Ancien maire de Prades dans les Pyrénées-Orientales, Jean Castex a répété à de nombreuses reprises qu’il voulait donner toute leur place aux «territoires». Il s’agit de «faire confiance» à la «France de la proximité». Un «droit à la différenciation» sera «consacré dans une loi organique», a-t-il annoncé, et «nouvelle étape de la décentralisation» sera mise en place avec une «évolution profonde de l'organisation interne de l'Etat». C’est la prolongation des initiatives du précédent gouvernement dans ce domaine et la concrétisation d’un discours présidentiel favorable à la transformation de la puissance publique jusqu’à prétendre faire des préfets des «entrepreneurs de l’Etat», comme l’avait esquissé Emmanuel Macron en 2017. Premier signe concret du gouvernement Castex : en 2021, «toutes les créations d'emploi seront affectées dans les services départementaux et aucun dans les administrations centrales».
«L’écologie n’est pas l’apanage d’un parti»
Une déclaration d’amour à la «France du bon sens». Dans une formule surprenante, le Premier ministre a promis d’écouter «la France qui ne dit rien mais n’en pense pas moins», «une France du bon sens et de la raison». Pour l’ancien haut fonctionnaire, il est nécessaire de repenser «l’action publique». «Le règne de l'impuissance publique fait le lit du discrédit de la volonté politique», a-t-il déploré, après avoir regretté que parfois «les décrets se perdent dans les méandres sinueux et opaques au point de n'impacter que de manière lointaine, incertaine et souvent incomprise la vie quotidienne de nos concitoyens». Très macronien dans son propos, Jean Castex a considéré que le rôle de l’Etat n’est pas de «tout régler» mais de donner les moyens aux individus de s’émanciper.
Ne pas laisser l’écologie aux écologistes. Tout en se posant en champion de l’écologie -«faire de l'économie française l'économie la plus décarbonée d'Europe», Jean Castex a pris soin de marquer le clivage entre son gouvernement et les écologistes qui ont remporté plusieurs victoires importantes lors des dernières élections municipales. «L'écologie n'est pas l'apanage d'un parti (…) elle doit être créatrice de richesses, je crois à la croissance écologique, pas en la décroissance verte», a-t-il déclaré.
La valse des milliards d’euros. Jean Castex a promis qu’aucun «effort fiscal supplémentaire» ne serait demandé aux Français pour financer la relance de 100 milliards d’euros déjà annoncée mardi par Emmanuel Macron. Parmi les mesures annoncées : 20 milliards d’euros pour la rénovation thermique des bâtiments, 40 milliards d’euros pour réduire la dépendance industrielle de la France dans «certains secteurs stratégiques», 6 milliards d’euros «de soutien supplémentaire en investissement» dans le système de santé, qui vont s’ajouter aux 8,1 milliards prévus par le Ségur de la santé. Sans hausse d’impôts et sans austérité, rejetée par Jean Castex, «c'est en favorisant le retour à une croissance riche en emplois et en travaillant davantage que nous pourrons restaurer les équilibres dans la durée», a avancé le Premier Ministre.
Insistance sur la sécurité et la laïcité. Fidèle à la ligne macronienne, Jean Castex a développé un discours contre le «séparatisme», visant spécifiquement «l’islamisme radical». Un projet de loi sera présenté à la rentrée, avec pour but d’«éviter que certains groupes ne se referment autour d'appartenances ethniques ou religieuses». A ces questions de laïcité, le Premier ministre semble lier la lutte contre «des minorités ultra violentes» qui «s'en prennent aux forces de sécurité et viennent désormais systématiquement ternir les manifestations sur la voie publique et leurs revendications légitimes». Il met également l’accent sur la sécurité, en promettant des «juges de proximité» contre les «incivilités du quotidien», avec un discours qui semble évoqué la brève revendication du concept de «tolérance zéro» qui avait marqué le discours du candidat Emmanuel Macron durant la campagne de 2017.
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Source: ParisMatch.com
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