вторник, 28 июля 2020 г.

Algérie : le sacrifice du mouton de l’Aïd-el-Kébir pris au piège du Covid-19

« On a discuté avec nos deux enfants et on a pris la décision : pas de mouton à la maison cette année. » Imad et Leïla ont vite tranché la question, disent-ils. Ce couple d’universitaires algérois a décidé d’acheter un mouton à l’abattoir et « d’appliquer les règles de la religion, donner les deux tiers aux plus démunis ». « C’est du suicide collectif que de permettre d’organiser les abattages dans les quartiers, avec tout ce monde qui s’agglutine autour », renchérit Leïla, qui en veut aux autorités de ne pas avoir carrément interdit le rituel du sacrifice du mouton de l’Aïd-el-Kébir ce vendredi.

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Le rituel maintenu…

Le 14 juillet dernier, la Commission interministérielle de la Fatwa (avis religieux) s’était prononcée en faveur du maintien du sacrifice des moutons lors de l’Aïd tout en recommandant de prendre toutes les précautions nécessaires et le respect des mesures barrières pour éviter une plus importante prolifération du nouveau coronavirus. La même commission a aussi appelé à accomplir la prière de l’Aïd à domicile, en groupe ou individuellement, sans prêche. Le maintien du rituel sacrificiel, s’il a satisfait une bonne partie de l’opinion attachée au rituel, a fait bondir les spécialistes de la santé alors que les cas de contaminations connaissent une hausse cette fin de semaine après une très courte accalmie. Mardi, l’Algérie enregistrait pour les dernières 24 heures 616 cas et huit décès.

… contre l’avis des spécialistes et des professionnels de santé

Cette semaine, un groupe d’experts (en épidémiologie, en pneumophtisiologie et en médecine interne) ont lancé un appel pour « une renonciation au sacrifice du mouton cette année ». « Dans toutes les wilayate [départements] remontent les exemples nombreux de familles entières atteintes par l’infection avec parfois, hélas, une issue fatale pour les membres les plus fragiles. Les regroupements créés par les événements à caractère familial (mariages, funérailles…) ou religieux (Aïd-el-Fitr) ont été pointés comme facteurs directement responsables de la flambée épidémique, anéantissant tous les efforts et sacrifices consentis depuis le début de la riposte », estiment ces experts.

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À leurs yeux, il faudra en tirer les leçons : « Notre groupe joint sa voix à celle du Collectif des professeurs en sciences médicales, relayée largement dans la presse et les réseaux sociaux par bon nombre d’éminents médecins et professionnels de santé qui ont clairement plaidé en direction des hautes autorités du pays pour une renonciation au sacrifice du mouton en cette année 2020. » Mi-juillet, le Collectif des professeurs en sciences médicales a rappelé que « l’annulation du sacrifice décrétée, durant l’Aïd de 1966 par feu le président Houari Boumédiène, certes dans un tout autre contexte visant alors à donner plus de temps aux cheptels de se multiplier, a toutefois eu l’adhésion de toute la population algérienne ». Le même collectif a proposé que « dans chaque commune, un imam ou le maire de la localité procède au sacrifice au nom de toute sa population ».

La question du confinement posée

Cette polémique flambe alors que des voix appellent à imposer un confinement total et strict. Interrogé sur la possibilité d’imposer un semi-confinement durant l’Aïd-el-Kébir comme ce fut le cas durant l’Aïd-el-Fitr (fin du Ramadan), le ministre de la Santé a réagi : « Je ne vous dis pas que ça va être confiné de la même manière, mais la similitude entre les deux fêtes, ce sont les rencontres familiales, tout en prenant en compte, cette fois-ci, des attroupements de gens autour des moutons, notamment le jour de l’Aïd à travers l’acte du sacrifice de la bête. » Le Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) plaide, lui, pour un « confinement total » durant les deux jours de l’Aïd. Pour sa part, Khaled Saïd, président de l’Union des médecins algériens (UMA) pour la région Est, partage cette inquiétude : « Nous avons la certitude que les chiffres vont flamber après l’Aïd. Le confinement total est la meilleure solution. »

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Éclatement des lieux de vente des moutons

Entre-temps, la vente des moutons s’organise et s’adapte à la nouvelle donne pandémique. De visu, les marchés informels, dans des garages privés en ville par exemple, sont en net recul à Alger. Le wali (préfet) de la capitale avait interdit l’accès au département des camions et véhicules de transport, de vente du bétail et du fourrage en dehors des points de vente autorisés, sauf pour le transport du bétail destiné aux abattoirs, sur présentation d’un certificat vétérinaire.

Des points de vente s’organisent dans la périphérie des villes, notamment dans les exploitations agricoles et les fermes. « Là, les propriétaires des lieux imposent sérieusement les consignes de distanciation et de protection, c’est leur lieu de travail et de vie parfois, donc ils font plus attention », témoigne Ali, qui est allé chercher son mouton dans une des exploitations au sud d’Alger. « Mais ce sont les clients qu’il faut discipliner : pourquoi venir en famille ou en groupe pour acheter un mouton ? » s’interroge-t-il.

D’autres préfèrent suivre la nouvelle mode des ventes de moutons… sur Internet. Les sites de vente en ligne et les réseaux sociaux offrent une vitrine inédite de ce marché virtuel. La livraison gratuite est garantie, l’état de santé de l’animal et ses caractéristiques sont bien définis… « Je vous assure que mon mouton est bio, il ne mange rien d’industriel », lit-on sur une annonce en ligne ! Retour chez Imad et Leïla qui ont délégué l’abattoir pour choisir et sacrifier le mouton. « Dans le Coran, Dieu dit «Ni la chair ni le sang de ces animaux n’ont d’importance pour Dieu. Seule compte pour Lui votre piété» », lance Imad, ajoutant : « Alors pourquoi toute cette folie autour du rituel ? L’essentiel est de préserver les vies. »

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Source: lepoint.fr

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