пятница, 19 июня 2020 г.

Dans les archives de Match — Il y a dix ans, le mariage de Victoria de Suède

En 2010, Victoria de Suède avait, enfin, pu épouser son grand amour, le roturier Daniel… Avec Rétro Match, suivez l'actualité à travers les archives de Paris Match.

Il était une fois une princesse et un jeune homme du peuple qui s'aimaient d'amour tendre… Il y a dix ans, un conte de fées devenait réalité à Stockholm, et faisait souffler le vent de la modernité dans les Couronnes du Vieux Continent. Le mariage de Victoria, héritière du royaume de Suède et de Daniel Westling, patron de salles de fitness, a été célébré le samedi 19 juin 2010 au palais royal. Ils avaient mis sept ans à faire accepter leur couple par l'opinion publique et le roi Carl Gustaf. Car Daniel est un roturier, un vrai «Svensson», comme on surnomme le Suédois moyen.

En mai 2002, le couple est photographié en train de s'embrasser. La Suède, championne de l'égalitarisme, redécouvre tout à coup la lutte des classes. Dans les bars de Stureplan, le ghetto de la jeunesse dorée, on se déchaîne contre «le plouc», «le paysan», ses pantalons treillis, sa collection de casquettes. Pourtant, derrière la naissance modeste et la scolarité moyenne du jeune homme d'Ockelbo, petit ville à 200 km de Stockholm, se cache un destin de self-made-man. De simple professeur de sport, sa passion, Daniel Westling est devenu un entrepreneur respectable, à la tête d'un petit empire du fitness.

On lui crédite un autre succès, inestimable, qui est celui d'avoir rendu Victoria heureuse. La princesse n'a jamais caché la pression que ce «travail» faisait peser sur elle. En plus de la couronne, elle a hérité de la dyslexie de son père, un sujet tabou. Victoria, elle, a raconté ses angoisses d'écolière, les lettres qui dansent, les camarades de classe qui ricanent. A 20 ans, ses angoisses la rongent, littéralement : elle devient maigre, très maigre. Le palais est obligé de reconnaître son anorexie.

«J'avais l'impression de ne plus exister», expliquera-t-elle. Une thérapie lui permet de recouvrer la santé, mais la peur de ne pas être à la hauteur demeurent. Les soins passeront notamment par le sport, avec un entraîneur personnel… un certain Daniel Westling. Au fil des années à ses côtés, Victoria va se métamorphoser.

« Je remercie le peuple suédois car il m'a donné mon prince », a lancé Victoria de Suède à la foule avant d'embrasser son nouvel époux. Devant 1 200 invités, 16 familles royales et des centaines de caméras installées jusque dans leur calèche, la future reine, et celui que l'on appelle désormais le prince Daniel, ont voulu prouver, par un mariage qui n'était pas gagné d'avance, que « l'amour est plus fort que tout ».

Voici le reportage consacré mariage de Victoria de Suède, tel que publié dans Paris Match en 2010…

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Paris Match n°3188, 23 juin 2010

Conte de fées à Stockholm

De notre envoyée spéciale à Stockholm Ghislaine Ribeyre

Après huit ans d'amour, la princesse héritière Victoria a enfin épousé Daniel, son prof de gym.

Elle a la voix qui vacille. Et lui, il pleure. Au cours des innombrables répétitions de leur mariage, Victoria de Suède et Daniel Westling ont pourtant passé deux jours à mémoriser chaque geste et chaque mot. Tout avait été calculé, millimétré, de la présentation des bagues aux mouvements de la traîne en passant par le « ja » (oui). Mais voilà, ils sont amoureux et émus. Alors devant l'autel de la cathédrale, ils tremblent en se passant la bague au doigt. Et quand l'archevêque Anders Wejryd annonce qu'ils sont enfin « mari et femme », Daniel écrase furtivement une larme, derrière les montures épaisses de ses lunettes.

Sur les marches de la cathédrale, alors que les gardes du palais leur font une haie d'honneur en brandissant leurs épées, ils osent leur premier baiser « officiel ». C'est une révolution : le roi Carl XVI Gustaf et la reine Silvia ne se sont jamais embrassés en public, même pas le jour de leur mariage, il y a exactement trente-quatre ans. Daniel et Victoria, eux, ne se contentent pas d'un seul baiser : ils recommenceront en bateau, au balcon du château, au cours du dîner, pendant le bal… Comme pour rattraper le temps perdu, les huit ans passés à cacher leur amour et à attendre que Daniel, l'ex-prof de gym, soit accepté par le roi et par la cour. A moins qu'ils ne souhaitent, en pratiquant assidûment le « french kiss », honorer Jean-­Baptiste Bernadotte, le fondateur français de la ­lignée. Ils semblent alors seuls au monde, oublieux de la pompe ­déployée en leur honneur.

Deux millions d'euros de budget, 40 000 fleurs, 16 familles royales invitées, un nombre record de tiares au mètre carré, 21 coups de canon : ce mariage est le plus somptueux depuis celui de Charles et Diana. L'événement, mille et mille fois annoncé, n'était d'ailleurs pas apprécié par tous les Suédois : on attendait un million de personnes dans les rues de Stockholm, ils ne sont « que » 500 000. Depuis des semaines, le « mariage du siècle » était partout : dans les campagnes de pub d'Ikea à la télé (des centaines d'heures de programmes), dans les magasins où s'amoncelaient des dizaines d'objets souvenirs. Même l'aéroport de Stockholm avait été rebaptisé « aéroport officiel de l'amour ».

Avant même que ne retentissent les six cloches de la cathédrale, beaucoup de Suédois frôlent donc l'overdose. D'après les sondages, ils ne sont plus que 46 % à soutenir la monarchie. Pourtant, en ce jour de noces, personne ne polémique. Pendant vingt-quatre heures, la Suède oublie ses idéaux socio-démocrates pour libérer son âme de midinette. Dans les rues de la vieille ville, s'arrachent les accessoires stars du jour : le drapeau suédois, vendu un euro, le diadème en strass, la couronne en carton.

Au bord de l'eau, sur le trajet du cortège, Cecilia, Jenny et Emma, trois jolies blondes d'une vingtaine d'années, ont réservé leurs places et s'installent avec classe: nappe blanche étalée par terre, champagne et corbeille de fraises. «Royalistes, nous? Pas du tout! Romantiques, plutôt: on veut applaudir Victoria et Daniel, parce qu'ils s'aiment, et qu'ils le montrent. Et puis c'est un jour historique. On le racontera à nos enfants.» Pour s'inscrire dans l'Histoire, le programme multiplie les références au passé. Victoria porte le même diadème en camées et le même voile que sa mère lors de son mariage, en 1976. L'archevêque Anders Wejryd officie dans l'aube d'apparat portée lors de tous les mariages royaux depuis le XVIIIe siècle.

Même la robe de Victoria s'inspire du modèle Christian Dior porté par la reine Silvia: en satin duchesse, sobre et sans froufrous, mais en plus glamour, histoire de souligner la silhouette parfaite. Elle la sculpte depuis des mois, à raison de plusieurs séances de gym par semaine. Encouragé par Victoria, le couturier Par Engsheden a osé le décolleté dans le dos et les bras nus – une première pour une future reine. Les mariés ont également voulu que la liste des invités témoigne de leur histoire: les amis d'enfance de Daniel, qui sont aujourd'hui profs de sport ou employés, côtoient Felipe et Letizia d'Espagne, Rania et Abdallah de Jordanie, Frederik et Mary du Danemark…

Le couple a aussi convié les deux médecins qui leur ont sauvé la vie: Annika Kahm, spécialiste des troubles de l'alimentation, a aidé Victoria à surmonter son anorexie; Olof Heimbürger a soigné Daniel, atteint depuis ses 16 ans d'une rare infection des reins. L'opération a eu lieu dans le plus grand secret, il y a un an, juste après les fiançailles. Daniel a reçu un rein de son père, Olle. Il est aujourd'hui hors de danger. Sans le crier sur les toits, la cour a discrètement fait savoir que sa maladie, qui n'est pas héréditaire, n'empêcherait pas Daniel d'avoir des enfants…

16h30. La cérémonie (courte, une heure à peine) est terminée. Place au cortège! Sept kilomètres dans les rues de la ville où se presse la foule. A la dernière minute, les mariés ont choisi une calèche ouverte, tirée par quatre chevaux. Mais conte de fées ou pas, il faut vivre avec son temps, celui de la télévision et d'Internet: pas question d'être en retard devant les 67 caméras positionnées le long du parcours (il y en a même une à l'intérieur de la calèche). Alors, pour tenir les délais, le cortège prend le trot. Derrière les barrières, les spectateurs les plus sportifs piquent un sprint pour tenter de suivre le convoi. Pas facile avec des poussettes et des enfants sur les épaules.

Le statut social de Daniel est lui aussi modifié ou accéléré. En quelques minutes, de la fin de la cérémonie de mariage au début du cortège, sont épinglés à son frac une rosette bleu clair, une croix et une étoile –l'insigne des chevaliers de l'ordre du Séraphin, la plus haute distinction du royaume. Ne l'appelez plus Daniel Westling, mais «prince Daniel, duc de Västergötland». Le roi a même décidé de lui accorder le titre d'«altesse royale».

Un rêve éveillé que Daniel n'est pas le seul à vivre. Les yeux écarquillés, Charlene Wittstock, l'amie du prince Albert, assiste à son premier mariage royal. Son invitation a fait sensation: sur la liste, le nom de l'ex-nageuse figure au même rang que celui des princesses, le titre en moins. Elle est encore très bien placée pendant la cérémonie. Mais le soir, un stricte protocole est appliqué: la belle Sud-Africaine n'est pas sur la photo de famille, ni à la table d'honneur.

Dans la salle d'Etat, conçue en 1717 par l'architecte Tessin le Jeune, le palais royal sort le grand jeu: une table principale de 32 mètres de long, plus 38 tables rondes pour accueillir les 422 convives. Des pans de murs sont recouverts de fleurs. Le service en porcelaine de Sèvres est un cadeau de Louis XVI. Des chanteurs et des danseurs en costumes Renaissance lancent des pétales de roses sur les invités. Le champagne coule à flots et le gâteau de mariage (bio à 95%) culmine à 3,30 mètres. Plus question de se tenir à un minutage serré. Le roi Carl Gustaf offre une rose à la reine, pour fêter leurs trente-quatre ans de mariage. Olle Westling, le père de Daniel, lance en souriant à son fils: «Finalement, tu n'es pas devenu hockeyeur professionnel, mais nous sommes quand même fiers de toi.»

À 23h25, Daniel se lève. Le petit gars d'Ockelbo, celui que les commères de la cour ont longtemps présenté comme un provincial sans manières ni culture, va faire son premier discours de prince. Surprise: il passe du suédois à l'anglais avec facilité. Devant la «princesse de [son] cœur», il commence par une belle histoire: «Il était une fois un jeune homme, qui n'était peut-être pas un crapaud… mais certainement pas un prince non plus. Et le premier baiser n'y a rien changé. Pour se transformer, il a eu besoin du roi et de la reine, qui régnaient sur le royaume depuis fort longtemps.» Il évoque le cadeau que lui a fait un jour Victoria, avant de partir pour un voyage officiel d'un mois en Chine: «Un coffre, qui renfermait 30 lettres, une pour chaque jour où elle allait être loin de moi. Au lieu de dormir, elle avait passé la nuit à m'écrire.» Le discours devient une tirade passionnée: «Victoria, l'amour est plus fort que tout, et je t'aime tellement.» Sa voix se brise, Victoria est en larmes, les invités aussi. La salle entière – couronnes et tiares comprises – se lève pour faire une longue standing ovation à l'ex-petit gars d'Ockelbo.

Hollywood n'aurait pas osé un tel happy end, évidemment couronné par un nouveau baiser fougueux. Mais les Suédois en avaient besoin. Ils ne pouvaient se contenter d'un prince mal dégrossi. Parfois, quand un homme a foi en son destin, il parvient à endosser un habit que les pessimistes croient toujours trop grand. Pour l'amour de Victoria et de son pays, Daniel a réussi sa métamorphose.


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Source: ParisMatch.com

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